Blanc-seing
Lorsque j’ai lu sur son blog qu’elle avait un voisin mystérieux qu’elle épiait de temps en temps, cela m’a rappelé le premier appartement que j’ai occupé en arrivant à Paris. C’était un minuscule studio sous les toits avec de petites lucarnes pour seule clarté.
Autant dire qu’en levant les yeux par la fenêtre, mon seul horizon était le ciel et les toits d’en face. En bas, une cour d’immeuble. Ce qui fait que, lorsque je ne sortais pas de la journée, mon environnement se limitait à celui d’un animal en cage.
Ce n’est que la nuit qu’un peu de vie s’animait avec les lumières des appartements d’en bas qui laissaient deviner un peu de mouvement à travers les vitres ou la transparence des rideaux.
Quelle ne fut pas ma surprise lorsqu’un soir, j’aperçus, à travers sa fenêtre, une jeune femme se baladant presque nue. Elle faisait des allées venues. Je ne fus pas trop surpris du fait qu’elle se balada nue. Ce qui m’intrigua, c’est qu’elle portait en permanence pour seul vêtement un soutien-gorge. Je fus donc doublement intéressé lorsque je la regardais de temps en temps. Les jours passaient et toujours le fameux soutien-gorge sur ses seins. Parfois, elle déambulait totalement nue mais c’était pour aller sans doute prendre un bain ou aller se coucher.
J’en vins à échafauder hypothèses ; peut-être a-t-elle les seins qui pendent (non, elle avait de petits seins fermes) ; est-elle folle ? Cela resta un mystère pour moi.
Et à chaque fois que je regardais, toujours les mêmes déambulations avec cette tenue invariable. La couleur et la coupe changeait ; « Tiens, aujourd’hui elle porte un splendide rouge foncé à soie !» ; « Ce matin, elle est toute dentelle noire ». Cela me faisait penser à un ancien collègue qui changeait de montre selon ses états d’âme ; cela nous permettait de savoir s’il était de bonne humeur et comment il fallait le prendre.
Ce manège dura 4 longs mois avant que je ne connaisse la cause de cette tenue légère et inconnue à mes yeux.
En fait, un jour, un habitant de l’immeuble me parla des gens qui habitaient le bâtiment et, entre autres, de cette jeune femme. Lorsqu’elle arriva dans l’immeuble, elle se promenait entièrement nue à la vue des voisins (enfin, « ceux qui avaient envie de mater » disait-elle). Cependant, un beau jour, des voisins qui occupaient l’appartement d’en face virent d’un mauvais œil les déambulations de cette jeune femme ; « Cela pourrait mettre mal à l’aise leurs enfants » invoquèrent-ils.
Étant situé au dernier étage (excepté l’étage mansardé où j’étais), elle s’arrangea pour ne cacher que ce que ces gens voyaient (à savoir le haut). La consigne fut donc donné à cette jeune femme de cacher ce sein qu’ils ne sauraient voir.
Voilà comment une histoire simple a pu hanter mes jours ; je cherchais une explication qui était, en fait, claire et limpide.