Dialogue de sourd
Acte 1 : J’étais attablé avec des amis dans un restaurant asiatique du quartier chinois de Paris. Je me souviens de l’atmosphère. Les vitres du restaurant étaient couvertes de vapeur. Dehors, il faisait nuit, il avait beaucoup plu et les trottoirs brillaient. La lumière des néons et des lampadaires faisaient un joli reflet coloré. Et à l’aide de ma cuillère, je finissais une boule coco.
J’avais les yeux fixés sur mon assiette lorsque je vis apparaître, juste à côté de mon assiette, une main. Et dans cette main, un porte-clés avec, à son extrémité, une petite fille qui clignotaient dans des couleurs qui passaient du rouge au violet et au vert. Le temps de relever la tête, la jeune femme déposa un papier à côté. « Je suis sourde, aidez-moi … ». Je l’ai regardé droit dans les yeux ; elle est allée vers une autre table. Elle était de taille moyenne. Elle portait un pantalon de velours gris à fine côte et, sur sa chemise cachemire, elle avait mis une veste de survêtement rouge vermillon avec les 3 bandes de la marque de sport. Et elle avait noué sa courte chevelure avec un élastique.
Elle repassa 5 minutes plus tard ; et, le temps de reprendre papier et porte-clés, elle est sortie du restaurant s’enfuyant dans la nuit de la ville
Acte 2 : nous sommes le surlendemain ; il est 13h30. Je suis (à nouveau) attablé dans un restaurant avec une amie. Changement de quartier : Belleville (toujours à Paris). Nous sommes cette fois-ci au début du repas ; je n’ai pas encore commandé. Il fait clair dehors, le soleil pointe. Par contre, la salle est peu éclairée à part les rayons du soleil qui se reflètent sur les tables de l’entrée. Je jetai un regard sur les gens qui se trouvaient aux autres tables. J’aime regarder ce que les gens font. Et là, à 2 tables de la mienne, je suis interloqué ; j’aperçois une jeune femme de profil qui ressemble à cette jeune fille de l’avant-veille ; celle qui était sourde. Elle porte le même haut rouge mais a mis cette fois-ci une jupe ample à ourlets. C’est certainement son sosie, voilà tout. Quelques minutes après, cette jeune femme se lève pour se diriger vers les toilettes et passe devant moi, elle ne me regarde pas. Mais à présent, je suis certain que c’est elle ; elle a le même regard et puis je reconnais à l’instant son bracelet à breloques qu’elle portait sur son poignet droit.
Elle revient des toilettes et me fait alors face ; je la fixe, elle s’en aperçoit ; elle revient s’asseoir à sa table.
Acte 3 : je quitte le restaurant et vais payer au comptoir. La jeune femme est toujours à sa table avec un homme et une femme. Je ne la regarde pas vraiment lorsque je réalise qu’elle est en grande conversation verbale avec ces deux personnes. Elle constate à nouveau que je la fixe ; elle a compris que j’ai compris.